Je vois le Dr Epione toutes les deux semaines. Le Dr Epione c'est ma psy. Aujourd'hui, le cabinet sentait le moisi et toute la moquette était imbibée d'eau. Ithaque a subi des pluies torrentielles lundi et l'eau s'est infiltrée partout. Avec Thésée, par habitude et parce qu'un jour il a plu carrément dans notre lit, on a des seaux dans notre vieux grenier, on est toujours paré.
Chez la psy, sur le fauteuil, les sandalettes dans le sol humide, j'ai beaucoup pleuré aujourd'hui. J'ai dit la culpabilité, la peur de ne pas y arriver, la quête de sens du parcours médicalisé si l'infertilité est inexpliquée. Elle répond qu'il ne faut pas être pressé. Que le problème est psychique. Qu'il faut le chercher, le débusquer, le débloquer. Souvent j'ai envie de la quitter. Parce que ça fait mal et qu'on a du mal à se parler. Mais elle fait toujours mouche. Un détail, un mot, elle rebondit et une vanne s'ouvre. Des larmes en sortent mais aussi des idées et des réflexions à prolonger. Des choses enfouies, cachées, des pistes pour expliquer. Elle dit qu'il faut aussi chercher du côté de Thésée.
Aujourd'hui, on a commencé à aborder mon obsession pour l'eau en général et les piscines en particulier. J'en avais fait mon sujet d'études il y a 10 ans. Mon mémoire portait sur les motifs aquatiques comme révélateurs des liens maternels dans les films d'une réalisatrice argentine. Les pieds sur la moquette trempée et les joues pleine de larmes, à creuser le désir d'enfant et la maternité inaccessible, on était bien dans le sujet.